Une carte d'identité à deux puces contre la fraude
Après le passeport et avant le permis de conduire, la carte d'identité biométrique devrait bientôt voir le jour.
À l'instar du passeport, la carte d'identité prend le chemin de la biométrie. Les 27 avril, le Sénat examinera une proposition de loi, présentée par les sénateurs Lecerf et Houel, "relative à la protection de l'identité". L'idée est d'équiper cette carte d'identité nouvelle génération de deux puces : la première stockerait les informations d'état civil de son propriétaire (nom, prénoms, sexe, date de naissance, lieu de naissance, adresse) et certaines caractéristiques physiques (taille, couleur des yeux, photographie, empreintes digitales). La seconde, facultative, s'adresse surtout aux adeptes des transactions en ligne. Grâce à la signature électronique, elle deviendra un instrument d'authentification lors de démarches administratives et de transactions commerciales sur Internet.
Renforcer la sécurité et la confiance numérique
"Pour la première fois, le lien entre une personne et le document d'identité qu'elle possède va être établi alors que, jusqu'à présent, on considérait que le document d'identité était la personne", commente Christophe Naudin, chercheur au département de recherche sur les menaces criminelles contemporaines à l'université Paris 2. Cela va calmer les tentatives de se faire passer pour quelqu'un d'autre."
Quatorze mille plaintes pour usurpation d'identité ont été déposées en 2009, mais on estime à environ 200 000 le nombre de personnes annuellement victimes d'une infraction identitaire. Pis, souligne la proposition de loi, "dans le monde virtuel d'Internet, on évalue en 2009 en France à 400 000 le nombre d'usurpations d'identité et ce phénomène connaît une croissance particulièrement inquiétante". Ces chiffres correspondent au nombre de tentatives enregistrées pour se faire passer pour quelqu'un d'autre. À noter aussi qu'environ 88 000 personnes ont au moins deux identités. "Les délivrances indues de documents d'identité représentent encore en France une part importante des fraudes", note l'expert.
Base de données biométriques
La question de la sécurisation et de l'exploitation des données stockées dans la puce n'a pas échappé à ceux qui dénoncent les dérives du système, à travers notamment la création d'une base nationale de données biométriques. Les sénateurs proposent à cet égard un "traitement à caractère personnel facilitant le recueil et la conservation" des données, pour une utilisation strictement réservée à l'identification de son propriétaire. Tout dépendra donc des garanties que posera le texte pour éviter que les données soient utilisées à d'autres fins, notamment policières. Une pétition internationale, à laquelle se sont joints, pour la France, la Quadrature du Net et Privacy France, appelle le Conseil de l'Europe à examiner les conditions dans lesquelles s'effectuent le prélèvement et le stockage des données biométriques par les États membres. L'objectif est de s'assurer que les garanties fondamentales et les critères de proportionnalité, de subsidiarité et de sécurité sont respectés. Pour Simon Davies, fondateur de Privacy International, "dans une société démocratique, la collecte et le stockage des données biométriques de toute une population constituent une atteinte disproportionnée à la vie privée, mais également à d'autres droits, comme la présomption d'innocence".
Pourtant, affirment, pour leur part, les défenseurs du système, celui-ci ira dans le sens d'un renforcement des libertés individuelles. "Contrairement à ce que l'on pense, la biométrie est la protection de l'identité et la défense de plus de libertés individuelles et collectives, explique Christophe Naudin. On ne peut pas tricher sur la biométrie comme on peut le faire sur l'identité administrative. Le seul risque serait d'attribuer une identité à quelqu'un qui ne devrait pas l'avoir." En outre, de mémoire d'expert, il n'y aurait jamais eu de fraudes sur un dispositif d'empreintes digitales.
Bientôt un permis de conduire biométrique
Le permis de conduire biométrique est également dans les tuyaux législatifs. Dès 2013, une carte à puce, dotée de sa photo numérisée et gravée, de sa signature électronique et "éventuellement" de ses empreintes digitales, remplacera progressivement le papier rose en application d'une directive européenne du 21 décembre 2006. Ce nouveau permis permettra aussi de payer ses amendes et de connaître son solde de points. Il facilitera la répression des infractions commises au sein de l'UE. Mais la route est encore longue jusqu'à 2033, date à laquelle ce nouveau permis remplacera complètement le permis actuel.
source: le point.fr du 26/04/2011
De grincheux le croquant