Le camembert pourrait disparaître de Camembert
L'unique fabricant de la commune de Camembert dans l'Orne cherche un repreneur. Pour l'instant personne ne s'est manifesté pour reprendre une affaire pourtant rentable de 600.000 euros de chiffre d'affaires.
Le camembert pourrait bientôt ne plus faire partie du patrimoine du petit village de Camembert, dans l'Orne. Le dernier fabricant de ce fromage à pâte molle et croûte fleurie, né il y a plus de deux siècles et qui bénéficie d'une Aop (appellation d'origine protégée), cherche un repreneur. Mais les candidats ne se bousculent pas au portillon de la fromagerie Durand. Cette affaire artisanale est pourtant rentable; elle vend ses camemberts au prix moyen de 3,80 euros l'unité et réalise un chiffre d'affaires de l'ordre de 600.000 euros par an, avec trois associés et deux employés. «Nos clients sont les grossistes spécialisés qui fournissent les crémeries et épiceries fines, comme Odéon à Rungis, ainsi que 10% de vente directe à la ferme», commente Nadia Durand, l'une des trois associés de la fromagerie, épouse du fondateur, François Durand. En revanche, les camemberts Durand ne côtoient pas les rayons de la grande distribution.
Revers de la médaille, «c'est un travail très contraignant, qui demande une présence 7 jours sur 7 à la ferme. En 25 ans, nous avons dû prendre 11 jours de vacances avec mon mari et nos 3 enfants, ajoute-t-elle. Son mari François fabrique les fromages, à raison de 600 par jour. Leur beau-frère, Nicolas, s'occupe des 70 vaches laitières qui doivent être -pour moitié au moins selon l'Aop-, des vaches de race normande. «Il faut 2,25 litres de lait par camembert moulé à la louche en cinq couches successives, avec un temps de repos de 45 minutes entre chacune des cinq louchées», précise-t-elle. Les journées de travail commencent à 6h30. Elles se terminent 13 heures plus tard.
Des clients du monde entier
Aucun des trois enfants des Durand ne veut prendre la suite. «Notre aîné Maxime, est cuisinier dans un restaurant gastronomique à Caen; le second, Pierre se prépare à être infirmier et notre dernière, Eloane, est en CP», détaille Nadia. A 46 ans, elle voudrait souffler un peu, son mari, âgé de 52 ans, aussi. «Nous aimons le fromage et avons un projet en tête dans la vente en Normandie qui nous donnerait plus de temps libre», indique-t-elle.
En attendant qu'un successeur se présente à Camembert, la mairie suit l'affaire avec attention. «Cela nous inquiète énormément. Avec le musée sur le camembert cela forme un ensemble cohérent, indique la première adjointe de ce petit village de Normandie Cécile Leblanc. Mais que pouvons-nous faire, il s'agit d'une affaire privée», rappelle-t-elle, un brin fataliste.
Nadia/François Durand
La Héronnière 61120
Camenbert