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Le Blog De Papy-Bougnat

  • Papy-bougnat
  • De moi. retraité, passionné, curieux, gourmet, vivant au vert en Aquitaine
Signe particulier : « Ayant attrapé tout jeune la maladie bleue et pas guéri à ce jour !
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A L'affiche..

La culture Ne s'hérite pas, Elle se conquiert. 

 

[André Malraux]

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18 août 2024 7 18 /08 /août /2024 16:47
C'était le dernier de la tribue

Notre génération est en deuil, nous l'avons appris ce matin le dernier des géants vient de nous quitter ! Maintenant le rideau peut se refermer, il nous restera leur filmographie pour nous consoler ……..

C'était le dernier de la tribue

Ça, on peut dire qu'il s'y était préparé. Alain Delon est mort tellement de fois à l'écran que cela a dû lui paraître une dernière prise. Dieu, qui est un mauvais scénariste, a dit: «Coupez !» Delon ne s'est pas relevé. Il ne tiendra plus la barre du ketch de Plein soleil. Il ne noiera plus Maurice Ronet dans La Piscine. Il ne s'effondrera plus sous les yeux de Cathy Rosier dans une boîte de nuit tenue par Jean-Pierre Melville. Il est aujourd’hui libéré de la guerre que se menaient ses enfants, Anthony, Alain-Fabien et Anouchka, déballant leur querelle dans un dramatique mélo médiatico-judiciaire, indigne de la star qu’était leur père. Il fut un temps où le prince Tancrède de Lampedusa avait ce regard bleu, où Claudia Cardinale n'en revenait pas de danser dans les bras de ce fauve en uniforme garibaldien. Delon était nerveux, charmeur, électrique, inquiétant. Il avançait de sa démarche de jaguar. Le geste qu'il avait pour lisser le rebord de son chapeau de tueur à gages dans Le Samouraï... 

Sa barbe de trois jours, son pardessus en poil de chameau dans Le Professeur où il chavirait le cœur de Sonia Petrovna face à une Léa Massari attendrie et désolée. La ville de Rimini était triste, secrète, brumeuse. Le héros désenchanté conduisait une Traction noire, ressemblait au Brando du Dernier Tango. Delon semblait toujours garder un secret. Romy Schneider, radieuse, lui souriait en deux-pièces dans une bastide tropézienne. Dans une chambre forte, Charles Bronson, torse nu, essayait de lui voler la vedette. C'était dans Adieu l'ami et l'Américain n'arrivait pas à faire de l'ombre au Français. Du film, il reste les biceps de Delon et ce jeu qui consistait à glisser le plus de pièces de cinq francs dans un verre rempli d'eau à ras bord. 

On reconnaît les cinéphiles à ce que pour eux Fort Boyard n'évoque pas un jeu télévisé, mais la fin des Aventuriers où Delon expirait dans les bras de Lino Ventura. Ce sont des images qui ne s'oublient pas. Ce sont des images d'Alain Delon. Son laconisme était légendaire. Il n'avait pas besoin de longues tirades pour exprimer le désarroi d'un Monsieur Klein (1976), entreprise qui n'aurait jamais vu le jour sans son concours. Il fut L'Homme pressé de Morand devant la caméra de Molinaro. Le titre lui allait bien. La vie ne se déroulait sûrement pas assez vite à son goût. Delon enchaînait les chefs-d'œuvre, séduisait les metteurs en scène de génie. Il les comparait à des chefs d'orchestre et lui se disait leur premier violon. 

 

C’était Le dernier des géants 

Qui, qui d'autre, peut aligner dans son curriculum vitae Clément, Antonioni, Visconti, Losey, Melville ? Il a été Swann, Zorro et Chaban-Delmas. Il a planté un piolet dans la nuque de Trostski et conquis Sydne Rome. Il a joué Simenon, travaillé pour Godard sur le tard, lui qu'avait boudé la nouvelle vague. Tout au long de sa carrière, on le compara à son alter ego Jean-Paul Belmondo. Les deux s'affrontèrent dans Borsalino (1970), se retrouvèrent dans Une chance sur deux (1998). Ils avaient porté le cinéma français sur les épaules. Cette tâche avait fini par les lasser. Delon tint la dragée haute à Gabin et Ventura, deux colosses. Son admiration était destinée à John Garfield. Au bout d'un moment, il se sentit un peu seul. Les flics et les voyous perdaient de leur attrait. Les gens qu'il respectait disparaissaient un par un. À l'instar d'un Clint Eastwood, il passa à la réalisation. Il ne s'épargnait pas, ne détestait pas se faire démolir en gros plan. Ce solitaire cultivait l'amitié. D'un autre côté, ses brouilles n'étaient pas feintes. Sur un plateau, ses colères résonnaient comme le tonnerre dans une cathédrale. Dans une pièce, il entrait en foule. La présence qu'il avait. Un tel phénomène ne se reproduira plus. u fond de lui, il restait peut-être ce petit garçon de la banlieue dont les parents avaient divorcé quand il avait quatre ans, ce gamin placé en famille nourricière qui jouait dans la cour de la prison de Fresnes et qui avait entendu résonner les balles qui avaient exécuté Laval, l'apprenti-charcutier qui avait préféré s'engager pour l'Indochine. Ses 20 ans, il les fête en prison à Saïgon. Là-bas, il voit Touchez pas au grisbi. Le spectateur en treillis ne se doute pas une seconde que bientôt il partagera avec Gabin l'affiche de Mélodie en sous-sol (1963). Parfois, il se souvenait que son vrai père avait dirigé le Régina, une salle de Bourg-La-Reine en banlieue parisienne. ect......ect.......(+ de  90 films )

La passion porte un voile sombre. Il n'y aura plus d'Alain Delon. Son épitaphe était prête : « J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu et par cet être factice créé par mon orgueil et mon ennui. » Il va falloir s'habituer à vivre dans un monde sans lui. Il n'est pas sûr qu'il soit tellement habitable. Nous sommes tous des orphelins des années Delon.

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