Génération « Galet « 72 ans déjà…………………….
Je me souviens de cet étrange engin, obsolète par nature, porteur rien que par son nom de cet entre-deux qui en faisait un objet hybride tandis que les mobylettes italiennes « Bleue » de chez Motobécane détrônaient tranquillement l'incontournable pour les « cacous » qui faisaient de grands bruits strident dans nos rues, vrillaient nos oreilles et dépassaient allègrement les limitations de vitesse consenties à cette catégorie de véhicules tandis que les adeptes du vélo solex allait tranquillement, le buste droit et l’envie chevillée au corps de ne pas porter le casque.Il y avait quelque chose de chevaleresque dans leur volonté de se poser en pourfendeur de la modernité, de la vitesse et de la mode. Indémodable engin paradoxal qui portait fièrement son moteur en tête de fourche. Curieuse manette qui enclenchait le processus mécanique qui le mettait en état de fonctionnement. Rien de semblable chez ses consœurs pétrolettes.Le vélo solex symbolisait à lui seul la dignité d’une époque qui refusait de se plier aux injonctions d’un monde en accélération. Toute comme la 2 chevaux ou la 4 L chez les voitures, il y avait en lui un manifeste annonciateur des futurs décroissants. Il trouva naturellement refuge dans les bras des collectionneurs, des bricoleurs attentifs, toujours prompts à redorer le blason des créations humaines trop vite mises au rencart.Mais malgré cela le solex demeurera toujours pour moi, ce coursier maladroit et asthmatique traînant sa lenteur avec une douce ironie mécanique. Point besoin de chercher la performance quand on s’enfonce sur sa selle, bardée de ressorts épais, qui vous invite à supporter tous les chaos de la route sans rien sentir. Tout en lui vous plaçait d’ailleurs en marge des standards habituels. Ses poignées de frein inversées lui donnaient plus encore cette indépendance conceptuelle qui en faisait un engin totalement décalé.Sa béquille encore sortait du cadre. Elle le plaçait dans un équilibre que l’on pensait instable tout en étant résolument dans la continuité de sa robe noire. Son porte-bagages grossier et massif signifiait clairement que chez lui, c’était la robustesse qui était privilégiée en dehors de toute autre considération. Quant à ses pédales, elles revendiquaient clairement son appartenance à la grande et noble famille de la petite reine, renforcée par ses roues à rayons qui ne cherchaient pas à tromper leur monde.Vélo il était à quelques nuances près. Une nuance de taille si d’aventure - pas forcément extraordinaire car assez fréquente, vous tombiez en panne (d’essence le plus souvent). Il vous fallait alors débrayer le moteur et rentrer chez vous en pédalant. Qu’il était pataud alors ce vélo lourdaud. Vous en aviez plein les pattes une fois arrivé à bon port.Son pot d'échappement lui aussi sortait des canons habituels de la chose. Petite boule étrange sur la roue avant, il interrogeait le béotien qui se demandait à quoi pouvait bien servir cette curieuse excroissance. Tout en lui échappait aux critères habituels à commencer par son réservoir placé tout contre le moteur qui avait besoin de mélange, (solexine) cette subtile préparation dont vous choisissiez le dosage et qui se réalisait sous vos yeux.
Il méritait bien ce petit hommage de l’objet disparu à la veille de l'arrivée d'un nouveau printemps le 72 ième pour lui qui représente si bien ce symbole d'évasion mal ou pas connu pour certains et de surcroît qui n’ont pas eu la chance ou plutôt le bonheur de cette première liberté motorisée……….
Allez ! bon dimanche ............